Notre fis Laurent s'est suicidé le 22 août 2001 ; il aurait fêté ses 31 ans quelques jours plus tard le 31 ; il était très dépressif suite à un divorce très difficile après un an de mariage ; s'il n'y avait eu que sa femme cela se serait sûrement passé plus simplement mais elle a laissé son père prendre « l'affaire en main » et celui-ci voulait le faire payer au maximum, le détruire ; après appel sur appel mon fils a lâché prise : il ne voyait plus comment s'en sortir. Il a passé ses dernières vacances en juillet chez nous mais il ne voulait plus aborder son divorce, il voulait l'oublier tout en sachant que ce n'était pas possible ; il avait laissé traîner les choses et le dernier week-end avant sa mort il avait fait un courrier pour faire appel encore une fois mais n'avait pas posté cette lettre ; il ne s'est pas senti assez fort pour encore affronter la justice : il trouvait cela tellement injuste. Il n'a pas eu le courage de continuer et a pensé que c'était la seule solution pour mettre fin à ses soucis ; il se demandait toujours quand son beau-père arrêterait. Tout cela pour un an de mariage sans enfant.
Nous souffrons tellement : je n'arrive plus à dormir ; mon fils est dans ma tête quoi que je fasse, où que je sois ; toute notre vie a changé ; il est toujours au milieu de nous ; je me reproche tellement de choses et pourtant nous étions proches mais je crois qu'il ne voulait pas que nous nous fassions du souci ; nous avions beaucoup parlé pendant nos vacances ; il écoutait sur le moment mais étant dépressif je crois qu'il n'arrivait plus à avancer ; son entourage professionnel n'avait rien vu car sur son lieu de travail il cachait tout en étant plutôt rieur et « déconneur ». Rien ne laissait prévoir son geste : il avait des projets, il devait faire un stage de parapente avec un ami début septembre.
Il faut très peu de choses pour que tout bascule : cette nuit-là il n'avait pas dormi ; il n'a pas été travailler : le commissariat l'a appelé et il leur a répondu qu'il n'était pas bien et qu'il allait aller chez le médecin ; mais comme ils étaient en manque d'effectifs, ils ont rappelé une première fois en lui disant qu'il fallait qu'il soit là pour 13 h, puis une seconde fois vers 11 h 45 en lui répétant qu'il fallait qu'il soit là sinon cela allait mal se passer, etc... (nous avons la cassette du répondeur avec le message) car apparemment mon fils n'a pas répondu et son décès a été déclaré à 12 H ; vu son état il a été complètement dépassé et « a pété les plombs » comme on dit. Il avait son arme et s'est tiré une balle dans la tête.
Je leur en veux tellement de n'avoir pas compris car en plus c'était quelqu'un qui était toujours prêt à rendre service et à remplacer un collègue manquant : ce jour-là ils n'ont pas fait de sentiment. C'est tellement injuste. Je vais arrêter là car je n'en peux plus ; cela me fait mal à l'intérieur de moi-même.
Le pire c'est que notre peine n'est pas partageable ; les gens ne comprennent pas notre souffrance ; et un tel drame change tellement de choses dans notre vie.
Il me manque tellement !
Yveline
Rousset (France)